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Au Havre, la micro-ferme de Graville remplace la décharge sauvage

Tout d’abord, pour y accéder, il faut gravir un sentier pentu, celui des Génovéfains. Au-dessus de l’Abbaye de Graville (Seine-Maritime), on découvre un terrain de 2 000 m2 où s’activent d’un côté des jardiniers et de l’autre des terrassiers. Nous sommes arrivés à la micro-ferme participative de Graville. Depuis 2019, des membres de l’association Graine d’Union, une banque d’échanges et de conservation de graines non hybrides, transforment une décharge en potager et verger : « C’était un terrain abandonné du domaine public. Pendant des décennies, les gens venaient y jeter leurs déchets. Après avoir signé une convention de cinq ans avec la ville du Havre, nous avons lancé un chantier participatif pour créer une micro-ferme participative », explique Emmanuel, membre actif de l’association.

60000 canettes de bière vides

Ainsi, chaque dimanche matin, une cinquantaine de bénévoles ont défriché une nature sauvage qui a repris ses droits et dépollué la zone : « Il y avait énormément de déchets entassés par strates. En un an et demi, nous avons extrait plus de 80 tonnes d’ordures dont 60 000 canettes de bière vides. De façon anecdotique, nous avons retrouvé des objets sans doute volés (papiers, sacs, clés), un distributeur de préservatifs dévalisé ou encore une VHS en bon état de Miss Sénégal 2007 [rires]. En revanche, on n’a jamais retrouvé de produits toxiques. Les services de la ville se sont chargés de transporter tout ça à la déchèterie », détaille Jibril, le fondateur de l’association.

L’art de la restanque a supplanté la décharge. #Presse30 Frédéric Durand

Arrivé à la couche de terre saine, l’art de la restanque a débuté. Avec des centaines de palettes en bois, non traitées et colorées par des peintures sans solvant, l’association a créé un jardin par palier « tiré au cordeau à la main et sans machine ». Stabilisé et drainé par des pierres, l’ensemble est du plus bel effet.

À l’abri des intempéries

Seulement, le but n’est pas d’être joli ! Graine d’Union y plante toutes sortes de légumes et de fruits selon la technique de l’agroforesterie. « Le sol est toujours couvert. Ainsi, nous n’avons pas besoin d’arroser, ni de labourer. Il suffit de laisser faire la nature et les vers de terre. En plus, grâce à la protection des coteaux, il y a un microclimat. D’ailleurs, les moines de l’Abbaye y cultivaient déjà la vigne », ajoute Jibril.

Et les résultats sont là ! La première récolte fut prometteuse avec près de 250 kg de fruits et légumes cueillis : « Les produits ne sont pas voués à la vente. Une partie sera pour les bénévoles et les habitants du quartier. Majoritairement, cela ira aux associations d’aide alimentaire. En 2020, 80 % sont partis au Secours populaire, section étudiants » spécifie Emmanuel.



Et, comme cela est inscrit dans les statuts de l’association, des coins de la micro-ferme sont réservés à la récolte de graines pour alimenter la banque « et avoir des semences adaptées à notre type de territoire. Elles sont ensuite mises à l’abri de la lumière et de l’humidité. Des échanges peuvent ainsi avoir lieu avec des jardiniers et d’autres associations », complète le président de Graine d’Union.

Des animations pour les jeunes

L’énergie déployée par les bénévoles est aussi à destination des enfants. Ils proposent depuis peu des animations sous forme d’expériences et d’expérimentations « à des jeunes de centres de loisirs ou spécialisés, comme dernièrement le CROP (Centre de rééducation de l’ouïe et la parole, NDLR) du Havre. Ici, nous voulons être dans la transition écologique avec les plus jeunes, car ils sont le futur. L’environnement est un bien commun. Nous voulons que cette initiative fédère les gens et il y a peu de lieux comme le nôtre à portée de bus. C’est ouvert à tous », annonce Jibril.