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Paris : de l’art à la construction zéro carbone, nos déchets non-recyclables transformés en pierre

Elle est artiste peintre, dessinatrice, tisseuse d’algues marines, sculptrice et désormais un peu chercheuse, embarquée volontaire dans une l’aventure d’une innovation qui devrait contribuer à préserver la planète, même en construisant des routes, des maisons, des tunnels : ce vendredi, à l’occasion de la première vente aux enchères d’art durable, « MoreArtLessCarbon » (*), organisée par l’association à but non lucratif Change Now, acteur mondial dédié à la recherche de solutions écoresponsables, et la célèbre maison Christie’s, Caroline Desnoëttes offre la toute première sculpture jamais réalisée en « anthropocite ». Un nouveau matériau dont on jurerait, au premier toucher, premier coup d’œil, qu’il est de ces pierres très dures provenant de carrières. Et pourtant il est né… de vos déchets de bureau et autres rebuts industriels, les « DIB » que les fondateurs de la jeune start-up Néolithe, parviennent à transformer et pétrifier, sans un gramme de produit chimique. Encore une fois le vieil adage « rien ne se perd, tout se transforme » porte beau, mieux encore il contribue à concevoir le beau, l’art le plus zéro carbone qui soit. La vente aux enchères inédite rassemble ainsi 17 oeuvres d’une douzaine d’artistes qui tous ont choisi « d’intégrer l’écologie dans le processus de création », ainsi qu’explique Ronan de la Croix, commissaire d’exposition.

Une artiste engagée

C’est ce qui a plu à Caroline Desnoëttes, artiste parisienne engagée à travers ses créations toujours étroitement liées au vivant et aux cycles de la nature, qu’elle partage volontiers avec un public que l’art laisse généralement de côté. Enfants malades qu’elle initie au dessin animé, jeunes polyhandicapés qu’elle emmène au musée pour découvrir et reproduire Rodin… Une affaire d’empathie, de goût des autres, que l’artiste met aussi au service de la recherche, lorsqu’elle travaille avec des chercheurs du CNRS, des bioacousticiens et des spécialistes du monde marin, pour ancrer son travail dans une démarche naturellement écologique. Aujourd’hui « j’ai l’impression d’être au cœur de l’innovation, de la Recherche et développement d’un procédé qui réduira réellement les gaz à effet de serre « ! », s’enthousiasme-t-elle.

Un nouveau matériau de construction

Car pour « Mutations », l’œuvre proposé aux enchères Art for Change, Caroline a suivi son instinct et fait confiance au hasard de sa rencontre, début 2020, avec les fondateurs de Néolithe, une start-up encore inconnue crée par de jeunes ingénieurs d’AgroParisTech et de Polytechnique, avec la complicité du père de l’un d’eux, tailleur de pierre de formation, maçon et un peu visionnaire, convaincu de la possibilité de fossiliser les déchets pour en faire un béton innovant. Ses premiers travaux lui ont valu une médaille d’or des inventeurs au salon international de Genève, ils portaient aussi en germe Néolithe et un tandem père-fils exceptionnel.

« Notre solution concerne les déchets ultimes, ceux qui sont destinés à l’incinération ou à l’enfouissement, expliquent les fondateurs. Nous ne sommes pas une alternative aux solutions spécifiques aux déchets recyclés, mais une solution pour tous ceux qui ne le sont pas actuellement ». Déchets industriels, de déconstruction, voire ménagers, « tout fait ventre » du moment qu’ils ne contiennent rien de dangereux, et le voyage minéral se termine en granulats minéraux. Lorsque l’on sait que la filière construction française utilise 400 millions de tonnes de granulats par an, mais que leurs ressources ne sont pas infinies, « utiliser des granulats issus de matières recyclés devient indispensable pour préserver les gisements ». C’est la vocation de la toute jeune entreprise, dont le premier « fossilisateur » pilote, mis en service en mars dernier, peut traiter jusqu’à 10 t par jour. Le gain pour la planète : « le procédé est 5 fois moins polluant, et réduit de 80 % les émissions de gaz à effet de serre liées au traitement des déchets, assurent les jeunes polytechniciens de Néolithe. Sans compter qu’ils permettent 100 % de valorisation des matières ». « C’est la troisième voie des déchets, après l’enfouissement et l’incinération, le recyclage du non recyclable », sourit Caroline Desnoëttes.

Vente aux enchères Art for Change, ce vendredi 28 mai à 18 heures sur le site changenow.world/auction